Une boite



Je range, trie, empaquète. Pleure et sourit des recoins de mon enfance. Elle est morte lundi. Je suis arrivée le lendemain. Cette maison que j’avais déserté possède le fil rouge de mes années. Foulée les couloirs, les escaliers, débusquer la mémoire, ressentir les arbres, immense et surplombant. Je rentre dans une pièce, m’assoit, inspire et prend courage. Cette maison est grande et encombrée. Il fallait garder pour le cas où. Dans ma vie à moi, j’ai choisi de ne pas. Mes possessions se résument à ce que je peux emporter. Longues pérégrinations de celle qui ne trouve pas place au monde. Je caresse ce cahier, j’enfouis mon nez dans ce tissu, ne voit pas le temps s’écouler. Au détour d’un tiroir, je tombe sur cette boite. Ovale, une boite qui claque avec un cœur rouge en son centre. Elle est douce, elle rappelle que les vivants peuvent nous manquer avant leurs morts. Qu’il est dur pour certains d’être à la vie. Pleinement présent à l’autre. Elle rappelle les absences de sa mère qui avait besoin d’isolement certains jours, lorsque l’impact de l’existence était trop vif. Douloureux. Elle se souvient s’être coincé les doigts dans cette boîte qu’elle manipulait souvent, riche de son contenu. Elle se demande si l’intérieur recèle toujours ses trésors qu’elle collait contre ses joues. Un pour chaque jour lointain. Elle ouvre, il en reste un. Les lèvres rouge carmin se sont estompées sur le papier. On y devine encore les rainures de la bouche, baiser coloré, baiser caché, baiser tendresse quand sa mère n'était plus en mesure de rester. Elle referme la boîte et la glisse dans son sac. Elle restera là, jusqu'à ce que le rouge se soit échappé, jusqu’à ce que le deuil l’ait traversé.

 

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